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Autrefois peuplée de plus d’un million d’habitants, Donetsk était l’une des villes les plus prospères de l’est de l’Ukraine. Depuis 2014, l’économie s’effondre. Les plus grosses entreprises désertent cette « forteresse » appelée « République populaire » autoproclamée de Donetsk (RPD).

Lorsqu’elle fut créée en 2014, une grande majorité des institutions étatiques étaient déjà aux mains des rebelles. Un nouveau système fut érigé, avec ses propres lois, son propre gouvernement, son propre système de taxation. Depuis, tous les entrepreneurs sont contraints de s’inscrire au « Ministère des Impôts et Revenus » de la RPD. Une fois leurs affaires déclarées, les entrepreneurs versent une taxe de 2,5 % sur leurs revenus mensuels.

Les entreprises à plus petites échelles se retrouvent également impactées. Des dizaines de marchés, des centaines de petits magasins ont été brûlés par les bombardements dans différents quartiers de Donetsk ainsi que dans d’autres villes de la RPD. Beaucoup d’entrepreneurs ont tout perdu dans les combats, pas uniquement à cause des bombes, mais également à cause des pillages. Certains ont réussi à sauver les meubles et ont délocalisé leurs affaires dans le quartier central de Donetsk.

Un magasin détruit dans le district de Kievski.

Depuis que l’Ukraine a décidé d’imposer un embargo sur les territoires contrôlés, les principaux fournisseurs du marché économique des séparatistes proviennent de Russie, Biélorussie, Arménie, Géorgie, d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud. Malgré les tensions et le blocus économique, le marché représente une population de 3 millions d’habitants. De plus, en changeant les devises d’hryvnia en rouble russe, les échanges commerciaux avec la Russie et les républiques séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud (qui utilisent également le rouble russe) se retrouvent simplifiés. En mai 2017, Aleksander Zakharchenko, le chef de la RPD, décide d’interdir l’importation des produits ukrainiens néanmoins nourriture et boissons continuent à passer clandestinement par les postes-frontière.

Un petit magasin d’Ilovaisk dont la vitrine affiche un sticker indiquant la provenance des produits de RPD.

Le système bancaire a également subi une transformation profonde. En 2014, les banques ukrainiennes et internationales ont quitté la ville, rendant toute opération bancaire impossible. Depuis, les habitants vivant en RPD sont contraints de traverser les frontières russes ou ukrainiennes pour effectuer leurs opérations visa ou MasterCard. Depuis septembre 2015, la devise des « Républiques populaires » autoproclamées est officiellement le rouble russe.

En réponse au désert bancaire, le gouvernement de la RPD a mis sur pied une banque locale appelée « Banque centrale républicaine » (BCR). La BCR autorise les retraits d’argent pour toutes les cartes de crédit locales, souvent utilisées par les citoyens travaillant dans le secteur public. Les transferts d’argent en provenance de Russie deviennent également possibles grâce à des systèmes de transfert russes tels que KoronaPay.

Bureau d’échange à Kiev indiquant le taux de change des roubles russes.

Un système bancaire clandestin s’est également développé dans les « Républiques populaires » autoproclamées. Ces banques autorisent les retraits de n’importe quelle carte de crédit ainsi que les transferts par Western Union. Sur chaque transaction effectuée, 10 % sont ponctionnés de la somme. Le 6 juillet 2017, la présidente de la « Banque centrale républicaine » a annoncé que la « République populaire de Donetsk » négocie avec la banque d’Ossétie du Sud afin d’ouvrir des bureaux en RPD.

En résumé, la guerre dans l’est de l’Ukraine n’a pas uniquement détruit un pan entier des besoins humanitaires, il a aussi affecté un grand nombre de systèmes économiques dans la région. Le gouvernement a imposé ses restrictions sur le commerce, les pensions, le change, le secteur bancaire, dans les territoires occupés et ont contraint à la nationalisation les entreprises privées ce qui a aggravé le développement du Donbass et de la région toute entière. Des deux côtés de la ligne de front, on lutte contre une catastrophe économique en s’affrontant dans l’unique but de pouvoir exister en tant qu’État viable.

Texte : João Bolan et Sandra Alek

Photos : João Bolan

Traduction : Fanny Joachim